On va dire que je vire à l'obsession.
Donc, depuis début novembre, le baril, qui avait allègrement atteint le cours historique de $84 le 24 septembre dernier, a maintenant franchi un nouveau record pour caracoler du côté des $100 ($98 atteints le mercredi 7 novembre).
Pour rappel, quand je disais, voici deux ans, qu'on atteindrait bientôt ce niveau de valeur, tout le monde se gaussait. Voici deux ans, je tiens aussi à le rappeler, j'annonçais que la hausse du baril entraînerait avec elle une hausse générale des prix, puisque nous transportons toutes nos marchandises dans des véhicules qui fonctionnent au pétrole, et qu'en toute logique capitalistique les transporteurs répercuteraient sur leurs clients les surcoûts induits par la hausse du carburant ; et à mes yeux, il paraissait inévitable que ce mouvement inflationniste, notamment aux Etats-Unis, entraîne un affaiblissement du dollar ; or, comme le dollar est justement la monnaie de règlement du pétrole, il s'ensuivrait une accélération de l'augmentation du prix du baril (si le dollar perd de sa valeur, alors il en faut plus, numériquement, pour régler un prix inchangé). C'est exactement ce qui est en train de se passer, avec une envolée de $30 en trois mois (+40% sur la période quand même !).
Et maintenant, les vraies raisons de déprimer. Il faut savoir que le baril acheté aujourd'hui à New York n'arrivera aux pompes (et dans le réservoir de vos voitures) que dans trois mois. Vous trouvez que 1,30 euros le litre au Carrefour, ça fait cher ? Sachez que ça va encore grimper : là, vous achetez du pétrole vendu en août, à une époque où le baril s'échangeait encore à $70. Selon toute vraisemblance, vous le payerez 1,70 euros d'ici trois mois.
Vers Noël, ça va faire très mal. En fait, je ne serais pas étonné que certaines catégories sociales ne soient obligées, dans un mois, de choisir entre faire le plein et acheter un DVD ; mais à part ça, on continue d'assurer en haut lieu que le pouvoir d'achat va augmenter. Dormez tranquilles, chers somnambules.
C'est commencé. C'est irrémédiable. Bonne chance.
PS : l'Agence Internationale de l'Energie, qui claironne depuis dix ans que tout va très bien, Madame la Marquise, vient d'annoncer que la demande mondiale d'énergie allait s'élever de 50% d'ici 2030 en raison de la croissance chinoise et indienne. Ils vivent en pleine féérie, eux. L'OPEP n'arrive déjà plus à fournir la demande actuelle ; alors 50% de plus ! Il faut vraiment une totale inconscience pour énoncer des âneries pareilles. Imaginons le jour (peut-être prochain) où un tanker rempli au Qatar devra choisir entre franchir le canal de Suez vers les Etats-Unis, et se diriger plutôt vers l'Inde ou vers la Chine. Croyez-vous vraiment que le gouvernement américains laisse beaucoup de raisons d'hésiter ? La Chine et l'Inde ? Elles n'auront jamais le temps de se développer. Il me semble.