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Le Labyrinthe - souffle des temps.. Tamisier..

Souffle et épée des temps ; archange ; prophéte : samouraï en empereur : récit en genre et en nombre de soldats divin face à face avec leur histoire gagnant des points de vie ou visite dans des lieux saint par et avec l'art ... soit l'emblème nouvau de jésuraléme.

Se passer de pétrole ? C'est facile !

Je disais à la fin de cet article (largement remanié depuis la première version) qu'on pouvait déjà apprendre à se passer de pétrole. Pour ma part, je ne crois pas en consommer beaucoup, mais je triche parce que je n'ai pas de voiture : je fais, autant que possible, mes courses à vélo, directement à la ferme ou à l'abattoir (ce qui évite que les marchandises ne soient trimballées depuis leur lieu de production jusqu'à l'usine d'emballage, puis de là à la centrale d'achat, et de nouveau de là jusqu'aux rayons de mon détaillant, tout cela par camion, évidemment). Par ailleurs, ma géniale épouse compte, parmi ses amies proches, l'inénarrable Tiphaine Chagnoux, alias Hooly, qui vient de signer avec Hélène Baron un bouquin (Cosmétiques naturels, éditions Sully) sur l'art et la manière de préparer soi-même des savons, parfums, shampooings, crèmes hydratantes et autres dentifrices, si bien que nous avons considérablement réduit nos achats dans ce domaine. Je dois quand même remarquer que nous sommes motivés par des raisons idéologiques qui nous éloignent beaucoup des "Français moyens" par rapport à la consommation en général et au pétrole en particulier. (Pour d'autres idées dans d'autres domaines, voyez ici.)

Jérôme Spitz, lui,  partait de plus loin. Il raconte dans Sans pétrole, qui vient de paraître aux Editions Inverse, comment, à partir d'une vie "normale" (avec voiture, maison individuelle, comportements consuméristes banals, etc.) il a progressivement réussi à réduire (beaucoup !) sa consommation de pétrole. Il insiste : "Je ne suis pas écolo, pas altermondialiste. Il m'arrive juste d'être un peu radin." Avec beaucoup d'humour (l'achat de vingt litres d'huile de colza au supermarché, tout ça pour économiser trois euros par mois, est à se tordre), il dévoile toutes les astuces (les "éconologies") qu'il a testées. Elles sont parfois un peu foireuses mais s'avèrent souvent bien pensées, et d'une mise en oeuvre somme toute peu contraignante.

Enfin, et en marge des conseils pratiques, je tiens à signaler une petite merveille. Dans les années 70, le génialissime Gébé, vrai maître de la bande dessinée avait publié, dans le journal satirique Charlie Hebdo une série de planches globalement intitulées L'An 01 (prononcer "zéro un" SVP ; quelques planches sont visibles ici). L'idée de base est la suivante : avons-nous vraiment envie de passer notre existence à fabriquer des housses de sièges, à pester dans les embouteillages, à fourguer des fromages insipides ou à tenir des livres de comptes ? Est-ce vraiment l'idée que nous nous faisons d'une vie réussie ? Est-ce cela, être humain ? Pour y répondre, il faut y réfléchir ; et pour y réfléchir, il faut s'arrêter de courir une minute. Le point de départ de 01 tient dans cette petite phrase : "On arrête tout, on réfléchit, et c'est pas triste." Largement inspiré des idéaux hippies et de l'idée anarcho-syndicaliste d'une grève générale, l'an 01 aurait pu n'être qu'un hédonisme facile ; mais Gébé, pour qui l'intelligence primait tout, en tire une utopie presque pragmatique, en large part surréaliste mais pas plus délirante, au fond, que la logique du marché. Il en tire aussi une hilarante et salutaire leçon de résistance mentale et politique. Il en tire encore une réflexion philosophique du plus haut intérêt sur la place paradoxale de la pensée dans la condition humaine, à la fois moyen de libération et biais pour esquiver les vrais problèmes, voire instrument d'oppression. Enfin, grâce à la longue lettre critique d'un lecteur avisé, Jean Blanquet (allez donc faire un petit détour par son site plein de lumière-s), qu'il a le courage de citer intégralement, Gébé tire de l'an 01 une réflexion métaphysique inoubliable. C'est génial ! et ce chef-d'oeuvre, longtemps épuisé, a heureusement été réédité par l'Association en 2000. N'est-ce pas une bonne idée ?

Ce n'est pas tout. Les pages de Gébé avaient rencontré un tel succès que germa en juin 1971 l'idée de l'An 01 - un film à faire ensemble. Jacques Doillon, derrière la caméra (plus chef-opérateur que réalisateur), tourna l'essentiel des bandes. Les scènes étaient interprétées par de simples lecteurs de Charlie Hebdo désireux d'aller plus loin, d'incarner 01, pour (peut-être) que le tournage du film, concrétisant l'utopie de Gébé, la rende un peu moins imaginaire ; et que, le tournage continuant, le film rejoigne la réalité jusqu'à ce que, un jour, peut-être... Comme le dit un des personnages : "On en a un peu marre des exercices préliminaires !" Et un autre répond : "Eh bien, allons-y : arrêtons tout pour de bon." Toutes les bonnes volontés dûment mises à contribution (ni Gébé ni Doillon ne roulaient sur l'or), on reconnaît, au détour des séquences, quelques braves gars qui tiraient le diable par la queue, à l'époque (Depardieu, Balasko, Clavier, Higelin, Jugnot, Coluche et beaucoup, beaucoup d'autres). De ce prodigieux manque de planification, il résulte un film en noir et blanc, tout de bric et de broc, ni documentaire ni fiction, ni réussi ni raté, dont le seul mérite est sans doute d'exister en tant que film - lui aussi longtemps introuvable ; mais, ô bonheur ! MK2 vient de le rééditer en DVD. Laissez-moi, donc, mettre de côté mes "raisons idéologiques" pour vous conseiller, plus que vivement, d'acquérir ce joli petit disque tout de pétrole irisé : cet ovni cinématographique a tout du grand classique inclassable. Olivier, ça devrait t'intéresser.
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O
Et comment que ça m'interesse!  J'aime beaucoup Jacques Doillon, l'un des bons auteurs de l'après Nouvelle vague, et ce L'an 01 m'a tout l'air du petit trésor cinéphilique ! <br /> Je me suis renseigné sur son édition dvd, chez MK2, et j'ai appris que le film sortait dans le contexte d'une mini-collection sur mai 68, avec notamment le récent Les Amants réguliers, du grand Phillipe Garrel, cinéaste de la génération de Doillon. A mon tour de conseiller aux promeneurs du labyrinthe ce diamant noir, histoire d'une passion née sur les cendres de la révolution avortée. Une merveille.<br /> Sinon pour réagir plus précisément au propos de l'article, je trouve importante cette réflexion sur notre folle époque, au-delà de simples préoccupations écologiques. Qu'on se sente concerné ou non par mère Nature , il est impossible de ne pas s'inquiéter de la fureur de notre époque, où tout le monde s'affole dans une course effreinée à la production. Moi qui viens de commencer mon job d'été, je perçois plus que jamais ce qui manque terriblement à notre époque : du calme et du recul. Non mais oh ! 200 photocopies en une matinée, faut pas déconner !
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Et comment que ça m'interesse!  J'aime beaucoup Jacques Doillon, l'un des bons auteurs de l'après Nouvelle vague, et ce L'an 01 m'a tout l'air du petit trésor cinéphilique ! <br /> Je me suis renseigné sur son édition dvd, chez MK2, et j'ai appris que le film sortait dans le contexte d'une mini-collection sur mai 68, avec notamment le récent Les Amants réguliers, du grand Phillipe Garrel, cinéaste de la génération de Doillon. A mon tour de conseiller aux promeneurs du labyrinthe ce diamant noir, histoire d'une passion née sur les cendres de la révolution avortée. Une merveille.<br /> Sinon pour réagir plus précisément au propos de l'article, je trouve importante cette réflexion sur notre folle époque, au-delà de simples préoccupations écologiques. Qu'on se sente concerné ou non par mère Nature , il est impossible de ne pas s'inquiéter de la fureur de notre époque, où tout le monde s'affole dans une course effreinée à la production. Moi qui viens de commencer mon job d'été, je perçois plus que jamais ce qui manque terriblement à notre époque : du calme et du recul. Non mais oh ! 200 photocopies en une matinée, faut pas déconner !
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